Page:Bakounine - Œuvres t5.djvu/161

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On parle tant de liberté individuelle aujourd’hui, et pourtant ce qui domine ce n’est pas du tout l’individu humain, l’individu pris en général, c’est l’individu privilégié par sa position sociale, c’est donc la position, c’est la classe. Qu’un individu intelligent de la bourgeoisie ose seulement s’élever contre les privilèges économiques de cette classe respectable, et l’on verra combien ces bons bourgeois, qui n’ont à la bouche à cette heure que la liberté individuelle, respecteront la sienne ! Que nous parle-t-on de capacités individuelles ! Ne voyons-nous pas chaque jour les plus grandes capacités ouvrières et bourgeoises forcées de céder le pas et même de courber le front devant la stupidité des héritiers du veau d’or ? La liberté individuelle, non privilégiée mais humaine, les capacités réelles des individus ne pourront recevoir leur plein développement qu’en pleine égalité. Quand il y aura l’égalité du point de départ pour tous les hommes sur la terre, alors seulement — en sauvegardant toutefois les droits supérieurs de la solidarité, qui est et restera toujours le plus grand producteur de toutes les choses sociales : intelligence humaine et biens matériels — alors on pourra dire, avec bien plus de raison qu’aujourd’hui, que tout individu est le fils de ses œuvres. D’où nous concluons que, pour que les capacités individuelles prospèrent et ne soient plus empêchées de porter tous leurs fruits, il faut avant tout que tous les privilèges individuels, tant économiques que politiques, aient disparu, c’est-à-dire