Page:Bakounine - Œuvres t6.djvu/127

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avons une aussi, illustre maître. Seulement, elle ne regarde jamais en arrière, mais toujours en avant.

Vous ne vous contentez pas toutefois de constater notre athéisme et notre matérialisme, vous concluez que nous ne pouvons avoir ni amour pour les hommes, ni respect pour leur dignité ; que toutes les grandes choses qui de tout temps ont fait battre les cœurs les plus nobles : liberté, justice, humanité, beauté, vérité, doivent nous être complètement étrangères, et que, traînant au hasard notre existence misérable, rampant plutôt que marchant sur la terre, nous ne pouvons connaître d’autres soucis que de satisfaire nos appétits sensuels et grossiers.

Si un autre que vous le disait, nous l’appellerions un calomniateur éhonté. À vous, maître respecté et injuste, nous dirons que c’est là de votre part une erreur déplorable. Voulez-vous savoir à quel point nous aimons tous ces grandes et belles choses dont vous nous refusez la connaissance et l’amour ? Sachez donc que nous les aimons à ce point que nous sommes fatigués et dégoûtés de les voir éternellement suspendues à votre ciel, qui les a dérobées à la terre, comme autant de symboles et de promesses à jamais irréalisables ! Nous ne nous contentons plus de la fiction de ces choses, nous en voulons la réalité.

Et voilà le second article de notre foi, illustre maître. Nous croyons en la possibilité, en la nécessité de cette réalisation sur la terre ; en même temps, nous sommes convaincus que toutes ces choses que vous adorez comme des espérances célestes, en de-