Page:Bakounine - Œuvres t6.djvu/360

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révolte contre l’ordre de choses établi, et la conspiration pour organiser cette révolte, doivent être faites — et le sont réellement — par la jeunesse bourgeoise, avec la participation très faible de quelques centaines d’ouvriers des villes. La masse du prolétariat, et spécialement le peuple des campagnes, doit en être exclue, parce qu’elle apporterait dans ce système idéal la barbarie de ces passions rudes et réelles qui pourraient déconcerter les petites idées d’une jeunesse généreuse, mais bourgeoise de la tête aux pieds. Du moment qu’on projette une révolution anodine, ayant pour but bien déterminé de substituer à l’autorité existante une nouvelle autorité, il est nécessaire de conserver à tout prix la passivité des masses, qui ne doivent pas perdre la précieuse habitude d’obéir, et la bonne humeur et la sécurité des bourgeois, qui ne doivent pas cesser de commander et de dominer. Par conséquent il faut éviter à tout prix la question économique et sociale.

Et en effet qu’avons-nous vu ? Les mouvements spontanés des multitudes populaires — et des mouvements très sérieux, comme ceux de Palerme en 1866, et celui encore plus formidable des paysans de beaucoup de provinces contre la loi inique du macinato[1] — n’ont trouvé aucune sympathie, ou bien peu, dans cette jeunesse révolutionnaire d’Italie. Si ce dernier mouvement eût été bien organisé et dirigé par des hommes intelligents, il aurait pu

  1. L’impôt sur la mouture.