Page:Bakounine - Œuvres t6.djvu/370

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qu’à tromper l’impatience des ouvriers, à les repaître d’illusions, jusqu’au moment où, las d’être trompés, ils se révolteront et, ou bien renverseront cet État, ou bien seront mis à la raison par la « mitraille patriotique » de la bourgeoisie mazzinienne ; ou, au contraire, ce crédit sera sérieux, capable réellement d’émanciper toute la masse ouvrière, et alors, menacée d’une ruine imminente, la bourgeoisie s’insurgera et renversera cet État sincèrement populaire de Mazzini, à moins qu’elle ne soit elle-même écrasée et détruite par lui.

Mais dans ce cas que resterait-il ? Il resterait l’État capitaliste et commanditaire de tout le travail national, c’est-à-dire précisément l’État communiste, centralisé, omnipotent, destructeur de toute liberté et de toute autonomie tant des individus que des communes, tel que le rêvent aujourd’hui les socialistes allemands de l’école de Marx, et que nous anarchistes combattons plus que ne le combat Mazzini, bien qu’à un tout autre point de vue.

Ne vous écartez pas de ce programme, — continue Mazzini, — ne vous éloignez pas de ceux, parmi vos frères, qui vous reconnaîtront ces droits (seulement ces droits-là ? c’est bien peu de chose, et tout se réduit à autant de mensonges. Mais qui sont donc ces « frères » si généreux ? En connaissez-vous beaucoup dans la classe bourgeoise ? Non. Il y a quelques dizaines de philanthropes inconséquents, ridicules et impuissants, rhéteurs sentimentaux des congrès bourgeois. Il y a la petite Église mazzinienne, qui,