Page:Bakounine - Dieu et l’État, 1892.djvu/23

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es générations à venir, innocentes du crime commis par leurs ancêtres. Nos théologiens catholiques et protestants trouvent cela très profond et très juste, précisément parce que c’est monstrueusement inique et absurde. Puis, se rappelant qu’il n’était pas seulement un Dieu de vengeance et de colère, mais encore un Dieu d’amour, après avoir tourmenté l’existence de quelques milliards de pauvres êtres humains et les avoir condamnés à un enfer éternel, il eut pitié du reste, et pour les sauver, pour réconcilier son amour éternel et divin avec sa colère éternelle et divine, toujours avide de victimes et de sang, il envoya au monde comme une victime expiatoire, son fils unique, afin qu’il fût tué par les hommes. Cela s’appelle le mystère de la Rédemption, base de toutes les religions chrétiennes. Encore si le divin Sauveur avait sauvé le monde humain ! Mais non ; dans le paradis promis par le Christ, on le sait, puisque c’est formellement annoncé, il n’y aura que fort peu d’élus. Le reste, l’immense majorité des générations présentes et à venir, brüleront éternellement dans l’enfer. En attendant, pour nous consoler, Dieu, toujours juste, toujours bon, livre la terre au gouvernement des Napoléon III, des Guillaume Ier, des Ferdinand d’Autriche et des Alexandre de toutes les Russies.

Tels sont les contes absurdes qu’on débite et tes doctrines monstrueuses qu’on enseigne, en plein XIXe siècle, dans toutes les écoles populaires de l’Europe, sur l’ordre exprès des gouvernements. On appelle cela civiliser les peuples ! N’est-il pas évident que tous les gouvernements sont les empoisonneurs systématiques, les abêtisseurs intéressés des masses populaires ?

Voilà les ignobles et criminels moyens qu’ils emploient