Page:Bakounine - Dieu et l’État, 1892.djvu/24

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pour retenir les nations dans un esclavage éternel, afin de pouvoir mieux les tordre sans doute. Que sont les crimes de tous les Tropmann du monde, en présence de ce crime de lèse-humanité qui se commet journellement, au grand jour, sur toute la surface du monde civilisé, par ceux-là mêmes qui osent s’appeler les tuteurs et les pères de peuples ?

Et pourtant, dans le mythe du péché originel, Dieu donna raison à Satan, il reconnut que le diable n’avait pas trompé Adam et Ève en leur promettant la science et la liberté, comme récompense de l’acte de désobéissance qu’il les avait induits à commettre ; car aussitôt qu’ils eurent mangé du fruit défendu, Dieu se dit en lui-même (voir la Bible) : « Voici, l’homme est devenu comme l’un des dieux, il sait le bien et le mal ; empêchons-le donc de manger du fruit de la vie éternelle, afin qu’il ne devienne pas immortel comme Nous ».

Laissons maintenant de côté la partie fabuleuse de ce mythe et considérons-en le vrai sens, très clair, du reste. L’homme s’est émancipé, il s’est séparé de l’animalité et s’est constitué homme ; il a commencé son histoire et son développement spécialement humain par un acte de désobéissance et de science, c’est-à-dire par la révolte et par la pensée.

Le système des idéalistes nous présente tout-à-fait le contraire. C’est le renversement absolu de toutes ces expériences humaines et de ce bon sens universel et commun qui est la condition essentielle de toute entente humaine et qui, en s’élevant de cette vérité si simple et si anciennement reconnue, que 2 et 2 font 4, jusqu’aux considérations scientifiques les plus sublimes et les plus compliquées, n’admettant : d’ailleurs jamais rien qui ne