Page:Bakounine - Dieu et l’État, 1892.djvu/46

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choses qui émanent de la volonté du souverain ou de la votation d’us parlement élu par le suffrage universel, ne peuvent jamais être conformes aux des lois naturelles, et sont toujours également funestes et contraires à la liberté des masses, par cela seul qu’elles leur imposent un système de lois extérieures, et par conséquent despotiques.

La liberté de l’homme consiste uniquement en ceci : qu’il obéit aux lois naturelles, parce qu’il les a reconnues lui-même comme telles, et non parce qu’elles lui ont été extérieurement imposées par une volonté étrangère, divine ou humaine, collective ou individuelle quelconque.

Supposez une académie savante, composée de représentants les plus illustres de la science ; supposez que cette académie soit chargée de la législation, de l’organisation de la société, et que, ne s’inspirant que de l’amour de la vérité la plus pure, elle ne dicte que des lois absolument conformes aux plus récentes découvertes de la science. Eh bien, je prétends, moi, que cette législation et cette organisation seront une monstruosité, et cela pour deux raisons : la première, c’est que la science humaine est toujours nécessairement imparfaite, et qu’en comparant ce qu’elle a découvert avec ce qu’il lui reste encore à découvrir, on peut dire qu’elle est à son berceau. De sorte que si on voulait forcer la vie pratique, tant collective qu’individuelle des hommes, à se conformer strictement, exclusivement aux dernières données de la science, on condamnerait la société aussi bien que les individus à souffrir le martyre sur un lit de Procuste qui finirait bientôt par les disloquer et par les étouffer, la vie restant toujours infiniment plus large que la science.