Page:Bakounine - Dieu et l’État, 1892.djvu/60

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enfants et non pour les adultes ; et, pour qu’elles deviennent des écoles d’émancipation et non d’asservissement, il faudra en éliminer, avant tout, cette fiction de Dieu, l’asservisseur éternel et absolu. Il faudra fonder toute l’éducation des enfants et leur instruction sur le développement scientitique de la raison, non sur celui de la foi : sur le développement de la dignité et de l’indépendance personnelles, non sur celui de la piété et de l’obéissance ; sur le culte de la vérité et de la justice quand même, et avant tout sur le respect humain, qui doit remplacer, en tout et partout, le culte divin. Le principe de l’autorité, dans l’éducation des enfants, constitue le point de départ naturel : il est légitime, nécessaire, lorsqu’il est appliqué aux enfants en bas âge, alors que leur intelligence ne s’est pas encore ouvertement développée. Mais comme le développement de toute chose, et par conséquent de l’éducation, implique la négation successive du point de départ, ce principe doit s’amoindrir à mesure que s’avancent l’éducation et l’instruction, pour faire place à la liberté ascendante.

Toute éducation rationnelle n’est au fond que cette immolation progressive de l’autorité au profit de la liberté, le but final de l’éducation devant être de former des hommes libres et pleins de respect et d’amour pour la liberté d’autrui. Ainsi, le premier jour de la vie scolaire, si l’école prend les enfants en bas âge, alors qu’ils commencent à peine à balbutier quelques mots, doit être celui de la plus grande autorité et d’une absence à peu près complète de liberté ; mais son dernier jour doit être celui de la plus grande liberté et de l’abolition absolue de tout vestige du principe animal ou divin de