Page:Bakounine - Dieu et l’État, 1892.djvu/66

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non de l’Allemagne prolétaire ; — ses héros sont tout l’opposé de Mazzini et de Garibaldi : ce sont aujourd’hui Guillaume Ier, le féroce et naïf représentant du Dieu protestant, ce sont MM. de Bismarck et de Moltke, les généraux Manteuffel et Werder. Dans tous ses rapports internationaux, l’Allemagne, depuis qu’elle existe, a été lentement, systématiquement envahissante, conquérante, toujours prête à étendre sur les peuples voisins son propre asservissement volontaire ; et depuis qu’elle s’est constituée en puissance unitaire, elle est devenue une menace, un danger pour la liberté de toute l’Europe. Aujourd’hui, l’Allemagne c’est la servilité brutale et triomphante.

Pour montrer comment l’idéalisme théorique se transforme incessamment et fatalement en matérialisme pratique, il n’y a qu’à citer l’exemple de toutes les Églises chrétiennes et, naturellement, avant tout, celui de l’Église apostolique et romaine. Qu’’y a-t-il de plus sublime, dans le sens idéal, de plus désintéressé, de plus détaché de tous les intérêts de cette terre, que la doctrine du Christ prêchée par cette Église ? Et qu’y a-t-il de plus brutalement matérialiste que la pratique constante de cette même Église, dès le viiie siècle, alors qu’elle commença de se constituer comme puissance ? Quel a été et quel est encore l’objet principal de tous ses litiges contre les souverains de l’Europe ? Ses biens temporels, ses revenus d’abord, et ensuite sa puissance temporelle, ses privilèges politiques.

Il faut lui rendre cette justice, qu’elle a été la première à découvrir, dans l’histoire moderne, cette vérité incontestable, mais très peu chrétienne, que la richesse et la puissance, l’exploitation économique st l’oppression