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Le malicieux Achille Pigoult avait engagé tout le monde à religieusement écouter l’orateur qui se noyait dans ses phrases et périphrases.


CHAPITRE V

LES EMBARRAS DU GOUVERNEMENT D’ARCIS


En ce moment, plusieurs groupes de bourgeois, électeurs ou non, stationnaient devant le château d’Arcis, dont la grille donne sur la place, et en retour de laquelle se trouve la porte de la maison Marion.

Cette place est un terrain auquel aboutissent plusieurs routes et plusieurs rues. Il s’y trouve un marché couvert ; puis, en face du château, de l’autre côté de la place qui n’est ni pavée, ni macadamisée, et où la pluie dessine de petites ravines, s’étend une magnifique promenade appelée Avenue des Soupirs. Est-ce à l’honneur ou au blâme des femmes de la ville ? Cette amphibologie est sans doute un trait d’esprit du pays.

Deux belles contre-allées plantées de vieux tilleuls très-touffus, mènent de la place à un boulevard circulaire, qui forme une autre promenade délaissée comme toutes les promenades de province, où l’on aperçoit beaucoup plus d’immondices tranquilles que de promeneurs agités comme ceux de Paris.

Au plus fort de la discussion qu’Achille Pigoult dramatisait avec un sang-froid et un courage dignes d’un orateur du vrai parlement, quatre personnages se promenaient de front sous les tilleuls d’une des contre-allées de l’avenue des Soupirs. Quand ils arrivaient à la place, ils s’arrêtaient d’un commun accord, et regardaient les habitants d’Arcis qui bourdonnaient devant le château, comme des abeilles rentrant le soir à leur ruche.

Ces quatre promeneurs étaient tout le parti ministériel