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Théorie

se trouve en lui des forces qui portent cette machine à une puissance incomparablement plus grande que ne l’est sa puissance intrinsèque.

Dès lors, je quittai Borelli, certain de ne pas avoir fait une connaissance inutile en conversant avec ce beau génie ; et je fus attiré vers les savants qui se sont occupés récemment des forces vitales. Mais, hélas ! tous ressemblaient au géomètre qui prend sa toise et chiffre l’abîme ; moi, je voulais voir l’abîme et en pénétrer tous les secrets.

Que de réflexions n’ai-je pas jetées dans ce gouffre, comme un enfant qui lance des pierres dans un puits pour en écouter les retentissements ! Que de soirs passés sur un mol oreiller à contempler les nuages fantastiquement éclairés par le soleil couchant ! Que de nuits vainement employées à demander des inspirations au silence ! La vie la plus belle, la mieux remplie, la moins sujette aux déceptions, est certes celle du fou sublime qui cherche à déterminer l’inconnu d’une équation à racines imaginaires.

Quand j’eus tout appris, je ne savais rien, et je marchais !… Un homme qui n’aurait pas eu mon thorax, mon cou, ma boîte cérébrale, eût perdu la raison en désespoir de cause. Heureusement, ce second âge de mon idée vint à finir. En entendant le duo de Tamburini et de Rubini,