Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1855, tome 18.djvu/476

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choisie préférablement à Soulanges pour chef-lieu d’arrondissement. La sous-préfecture entraîna le tribunal de première instance et tous les employés d’un chef-lieu d’arrondissement. L’augmentation de la population parisienne, en augmentant la valeur et la quantité voulue des bois de chauffage, augmenta nécessairement l’importance du commerce de La-Ville-aux-Fayes. Gaubertin avait assis sa nouvelle fortune sur cette nouvelle prévision, en devinant l’influence de la paix sur la population parisienne, qui, de 1815 à 1826, s’est accrue en effet de plus d’un tiers.

La configuration de La-Ville-aux-Fayes est indiquée par celle du terrain. Les deux lignes du promontoire étaient bordées par des ports. Le barrage pour arrêter les bois était au bas de la colline occupée par la forêt de Soulanges. Entre ce barrage et la ville, il y avait un faubourg. La basse ville, située dans la partie la plus large du delta, plongeait sur la nappe d’eau du lac d’Avonne.

Au-dessus de la basse ville, cinq cents maisons à jardins, assises sur la hauteur défrichée depuis trois cents ans, entourent ce promontoire de trois côtés, en jouissant toutes des aspects multipliés que fournit la nappe diamantée du lac d’Avonne, encombrée par des trains en construction sur ses bords, par des piles de bois. Les eaux chargées de bois de la rivière et les jolies cascades de l’Avonne, qui, plus haute que la rivière où elle se décharge, alimentent les vannes des moulins et les écluses de quelques fabriques, forment un tableau très-animé, d’autant plus curieux qu’il est encadré par les masses vertes des forêts, et que la longue vallée des Aigues produit une magnifique opposition aux sombres repoussoirs qui dominent La-Ville-aux-Fayes.

En face de ce vaste rideau, la route royale qui passe l’eau sur un pont, à un quart de lieue de La-Ville-aux-Fayes, vient mordre au commencement d’une allée de peupliers où se trouve un petit faubourg groupé autour de la poste aux chevaux, attenant à une grande ferme. La route cantonale fait également un détour pour gagner ce pont où elle rejoint le grand chemin.

Gaubertin s’était bâti une maison sur un terrain du delta, dans le dessein d’y faire une place qui rendrait la basse ville aussi belle que la ville haute. Ce fut la maison moderne en pierre, à balcons en fonte, à persiennes, à fenêtres bien peintes, sans autre ornement qu’une grecque sous la corniche, un toit d’ardoises, un seul étage et des greniers, une belle cour, et derrière, un jardin à l’anglaise,