Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1855, tome 19.djvu/52

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VAUTRIN.

Tu devais la rendre avec respect ; mais l’or et les perles ont réveillé tes griffes de chat-tigre.

LAFOURAILLE.

Ah çà, l’on ne peut donc pas s’amuser un peu ? Que diable ! Jacques, tu veux…

VAUTRIN.

Hein ?

LAFOURAILLE.

Vous voulez, monsieur Vautrin, pour trente mille francs, que ce jeune homme mène un train de prince ? Nous y réussissons à la manière des gouvernements étrangers, par l’emprunt et par le crédit. Tous ceux qui viennent demander de l’argent nous en laissent, et vous n’êtes pas content.

FIL-DE-SOIE.

Moi, si je ne peux plus rapporter de l’argent du marché quand je vais aux provisions sans le sou, je donne ma démission.

PHILOSOPHE.

Et moi donc, j’ai vendu cinq mille francs notre pratique à plusieurs carrossiers, et le favorisé va tout perdre. Un soir, M. de Frescas part brouetté par deux rosses, et nous ramenons, Lafouraille et moi, avec deux chevaux de dix mille francs qui n’ont coûté que vingt petits verres de schnick.

LAFOURAILLE.

Non, c’était du kirsch !

PHILOSOPHE.

Enfin, si c’est pour ça que vous vous emportez…

FIL-DE-SOIE.

Comment entendez-vous tenir votre maison ?

VAUTRIN.

Et vous comptez marcher longtemps de ce train-là ? Ce que j’ai permis pour fonder notre établissement, je le défends aujourd’hui. Vous voulez donc tomber du vol dans l’escamotage ? Si je ne suis pas compris, je chercherai de meilleurs valets.

BUTEUX

Et où les trouvera-t-il ?

LAFOURAILLE.

Qu’il en cherche !

VAUTRIN.

Vous oubliez donc que je vous ai répondu de vos têtes à vous