Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 13.djvu/587

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construit en cailloux et en mortier, avait un étage surmonté d’un énorme toit en pente à deux pignons, sous lequel s’étendaient des greniers sans doute vides, vu le délabrement des lucarnes. Le rez-de-chaussée se composait de deux chambres séparées par un corridor, au fond duquel était un escalier de bois par lequel on montait au premier étage, également composé de deux chambres. Une petite cuisine était adossée à ce bâtiment du côté de la cour où se voyaient une écurie et une étable parfaitement désertes, inutiles, abandonnées. Le jardin potager séparait la maison de l’église. Une galerie en ruine allait du presbytère à la sacristie. Quand le jeune abbé vit les quatre croisées à vitrages en plomb, les murs bruns et moussus, la porte de ce presbytère en bois brut fendillé comme un paquet d’allumettes, loin d’être saisi par l’adorable naïveté de ces détails, par la grâce des végétations qui garnissaient les toits, les appuis en bois pourri des fenêtres, et les lézardes d’où s’échappaient de folles plantes grimpantes, par les cordons de vignes dont les pampres vrillés et les grappillons entraient par les fenêtres comme pour y apporter de riantes idées, il se trouva très-heureux d’être évêque en perspective, plutôt que curé de village. Cette maison toujours ouverte semblait appartenir à tous. L’abbé Gabriel entra dans la salle qui communiquait avec la cuisine, et y vit un pauvre mobilier : une table à quatre colonnes torses en vieux chêne, un fauteuil en tapisserie, des chaises tout en bois, un vieux bahut pour buffet. Personne dans la cuisine, excepté un chat qui révélait une femme au logis. L’autre pièce servait de salon. En y jetant un coup d’œil, le jeune prêtre aperçut des fauteuils en bois naturel et couverts en tapisserie. La boiserie et les solives du plafond étaient en châtaignier et d’un noir d’ébène. Il y avait une horloge dans une caisse verte à fleurs peintes, une table ornée d’un tapis vert usé, quelques chaises, et sur la cheminée deux flambeaux entre lesquels était un enfant Jésus en cire, sous sa cage de verre. La cheminée, revêtue de bois à moulures grossières, était cachée par un devant en papier dont le sujet représentait le bon Pasteur avec sa brebis sur l’épaule, sans doute le cadeau par lequel la fille du maire ou du juge de paix avait voulu reconnaître les soins donnés à son éducation. Le piteux état de la maison faisait peine à voir : les murs, jadis blanchis à la chaux, étaient décolorés par places, teints à hauteur d’homme par des frottements ; l’escalier à gros balustres et à marches en bois, quoique proprement