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CONTES DROLATIQUES.

Dixains. En prime abord, saichez que si aulcunes vertueuses dames, ie dis vertueuses pour ce que les truandes ou femmes de petit pied ne lisent point ces feuillets, aymant mieulx en faire de inedicts, tandis que au rebours les dames ou bourgeoyses à doubles paires de manches, pleines de religion, estant desgoustées sans doubte aulcun de ce dont s’agit, les lisent pieusement pour contenter le malin esperit, et par ainsy se tiennent saiges. Entendez-vous, mes bons vendengeurs de cornes ? Mieulx vault estre coux par le conte d’ung livre que coux par l’histoire d’ung gentil homme. Vous y gaignez le desguast, paouvres braguards, oultre que souvent vostre dame enamourée s’en prend à vostre mercerie des fécunds triballemens esmeus en icelle par le présent livre. Et par ainsy ces Dixains adiouxtent de belles graines à la gésine du pays et le maintiennent en ioye, honneur et santé. Ie dis ioye pour ce que vous en prenez moult en ces Contes. Ie dis honneur, pour ce que vous saulvez vostre nid des griphes de ce démon, touiours ieune, nommé Kockuaige en langue celtique. Ie dis santé, pource que ce livre incite à la chousette prescrite par l’Ecclise de Salerne soubz poine de pléthore cérébrale. Treuvez proufficts pareils aux aultres cayers noircis typographicquement. Ha ! ha ! où sont les livres qui font des enfans ? Cherchez, point. Ains vous rencontrerez par razières enfans faisant des livres dont est conceu force ennuy. Ie reprends la phrase. Doncques saichiez que si aulcunes dames vertueuses de nature, cocquardes en esperit, se livrent publicquement à des querimonies au subiect de ces Dixains, ung numbre assez plaisant d’icelles loing de semondre l’autheur, advouent qu’elles l’ayment bien fort, l’estiment vaillant homme, digne d’estre moyne en l’abbaye de Thelesme, et que, pour autant de raisons que il y a d’estoilles aux cieulx, il ne quitte la fluste à bec avec-