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Page:Balzac - La Famille Beauvisage.djvu/231

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pagnée de son cousin, venant faire la visite de présentation.

M. et madame de Camps, Sallenauve et Jacques Bricheteau avaient dîné chez madame de l’Estorade, et avant le dîner, dans l’intérieur de la famille, s’était passée une scène qui n’avait pas manqué de gravité et d’intérêt.

Madame de l’Estorade avait réuni ses enfants, et, en présence du vieux Maucombe, préalablement consulté, sans qu’il eût fait aucune objection au désir de sa fille, elle avait annoncé son mariage avec Sallenauve, ajoutant que la chose était déjà assez avancée pour qu’elle eût pensé devoir en faire part à madame de Rastignac qu’elle avait vue dans la journée.

À cette communication, elle avait mis un ton et un accent qui n’avaient pas laissé d’étonner M. Armand. Ne voulant pas dire ce qui s’était passé entre elle et Naïs, et par conséquent, expliquer le point de départ de sa résolution, elle l’avait annoncée péremptoirement, sans apologie et sans commentaire, comme un acte réfléchi et bien arrêté de sa volonté, demandant seulement à ceux qui l’écoutaient, de continuer à M. de Sallenauve, devenu son mari, les sentiments d’affection et d’estime auxquels plusieurs services éminents rendus à la famille lui donnaient incontestablement droit.

Naïs qui avait fait le mariage, l’approuvait, cela va sans dire ; quant à René, il en avait reçu la nouvelle avec effusion ; M. Armand avait été seul à l’accueillir avec une froideur mal déguisée, et, portant une sorte d’appel par devant son grand-père, il lui avait demandé s’il donnait, au choix fait par la comtesse, toute son approbation !

— Elle est bienne assez grande pour se décider ! avait répondu le bonhomme avec son insouciance provençale.

Armand ne s’était pas encore tenu pour battu, et il avait sollicité de sa mère un entretien particulier ; sans doute il se proposait de présenter la filiation de Sallenauve comme en faisant un successeur peu convenable de M. le comte de l’Estorade.

Mais depuis l’affreux malheur que le jeune despote avait été sur le point de causer par ses façons violentes avec sa sœur, madame de l’Estorade avait bien perdu de