Page:Balzac - Les petits bourgeois, tome 2, 1855.djvu/36

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gardée, une plaie aussi cruelle que celle du Mont-de-Piété ; Cérizet donnait dix francs le mardi, sous la condition d’en recevoir douze le dimanche matin. En cinq semaines, il doublait ses capitaux ; mais il y avait bien des transactions ; sa bonté consistait à ne retrouver de temps en temps que onze francs cinquante centimes. On lui redevait des intérêts. Quand il donnait cinquante francs pour soixante à un petit fruitier, ou cent francs pour cent vingt à un marchand de mottes, il courait des risques.

En arrivant par la rue des Postes à la rue des Poules, Théodose et Dutocq aperçurent un rassemblement d’hommes et de femmes, et à la clarté que les quinquets du marchand de vin y jetaient, ils furent effrayés en voyant cette masse de figures rouges, lézardées, grimées, sérieuses de souffrance, flétries, ébouriffées, chauves, grasses de vin, maigries par les liqueurs, les unes menaçantes, les autres résignées, celles-ci goguenardes, celles-là spirituelles, d’autres hébétées qui s’élevaient sur ces terribles haillons que le dessinateur ne surpasse jamais, même dans ses plus extravagantes fantaisies.