Page:Balzac Histoire des oeuvres 1879.djvu/120

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ments de deux articles de Balzac, publiés antérieurement ; l’un : le Petit mercier, qui va de la ligne 20 page 253, à la ligne 17 page 255, parut dans la Caricature du 16 décembre 1830 ; mais il est réimprimé si différemment, que nous avons cru bien faire d’en conserver la version primitive dans les Œuvres diverses (voir tome XXIII, page 213) ; l’autre, les Jeunes gens de Paris, parut en 1834 dans le tome IV du Nouveau Tableau de Paris au xixe siècle, sept volumes, par divers auteurs, chez Madame Charles Béchet, 1834-1835. Ce dernier morceau est incomplet dans la Fille aux yeux d’or ; il va dans la présente édition de la ligne 15 de la page 269, à la ligne 5 de la page 272, où, après les mots « sans avoir un sou », on lisait dans le Nouveau Tableau de Paris :

Il existe encore certains béjaunes qui arrivent de province, et auxquels les jeunes gens à la mode apprennent l’art d’écorner proprement une succession. Ces écervelés périssent à Paris s’ils ne se réservent pas un dernier gâteau à manger dans leur province, quelque établissement certain. Malheur à ces héritiers, passés sans transition de leurs maigres cent francs par mois à toute la fortune paternelle, s’ils n’ont pas assez d’esprit pour s’apercevoir que l’on se moque d’eux. « C’était un pauvre garçon ! » est l’oraison funèbre destinée à ces infortunés qui viennent découvrir à Paris, moyennant quelques billets de mille francs, la valeur exacte des harnais, l’art de ne pas trop respecter ses gants, y entendre de savantes méditations sur les gages à donner aux gens, et chercher quel forfait est le plus avantageux à conclure avec eux. Après un an ou deux, ils savent parler en bons termes de leurs chevaux, de leur chien des Pyrénées ; ils peuvent reconnaître, d’après la mise, le marcher, le brodequin, à quelle espèce appartient une femme ; jouer l’écarté, retenir quelques mots à la mode, et conquérir, par leur séjour dans le monde parisien, l’autorité nécessaire pour importer plus tard en province le goût du thé, l’argenterie à forme anglaise, et se donner le droit de tout mépriser autour d’eux pendant le reste de leurs jours.

Presque toujours ces pigeons, attirés dans la grande maison de prostitution appelée Paris, y choisissent un parrain parmi les jeunes gens à la mode, et, comme une corvette timide qui se tient dans les eaux d’une frégate, ils en suivent les mouvements avec la ferveur d’un élève qui n’en est qu’à copier des nez ou des bras. Le parrain, lui, prend son pigeon, son béjaune, sa corvette, son élève en amitié pour s’en servir dans le monde, comme un hardi spéculateur se sert d’un commis de confiance. L’amitié fausse ou vraie de leur parrain est pour ces niais une position sociale, et ils se croient déjà forts en exploitant à leur manière leur ami intime. Ils vivent dans le reflet de leur ami, se mettent constamment sous son parapluie, ils en chaussent les bottes, et se dorent à ses rayons. En se posant près de leur parrain ou même en marchant à ses côtés, ils ont l’air de dire : « Ne nous insultez pas ! nous sommes deux vrais tigres ! » Souvent ils se permettent de dire avec fatuité : « Si je demandais telle ou telle chose à un tel, il est assez mon ami pour le faire… »