Page:Balzac Le Père Goriot 1910.djvu/252

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tout inventorié chez lui rentrèrent et parlèrent à voix basse au chef de l’expédition.

Le procès-verbal était fini.

— Messieurs, dit Collin en s’adressant aux pensionnaires, ils vont m’emmener. Vous avez été tous très-aimables pour moi pendant mon séjour ici, j’en aurai de la reconnaissance. Recevez mes adieux. Vous me permettrez de vous envoyer des figues de Provence.

Il fit quelques pas, et se retourna pour regarder Rastignac. Adieu, Eugène, dit-il d’une voix douce et triste qui contrastait singulièrement avec le ton brusque de ses discours. Si tu étais gêné, je t’ai laissé un ami dévoué.

Malgré ses menottes, il put se mettre en garde, fit un appel de maître d’armes, cria : « Une, deux ! » et se fendit.

— En cas de malheur, adresse-toi là. Homme et argent, tu peux disposer de tout.

Ce singulier personnage mit assez de bouffonnerie dans ces dernières paroles pour qu’elles ne pussent être comprises que de Rastignac et de lui. Quand la maison fut évacuée par les gendarmes, par les soldats et par les agents de la police, Sylvie, qui frottait de vinaigre les tempes de sa maîtresse, regarda les pensionnaires étonnés.

— Eh bien ! dit-elle, c’était un homme tout de même.

Cette phrase rompit le charme que produisaient sur chacun l’affluence et la diversité des sentiments excités par cette scène. En ce moment, les pensionnaires, après s’être examinés entre eux, virent tous à la fois mademoiselle Michonneau grêle, sèche et froide autant qu’une momie, tapie près du poêle, les yeux baissés, comme si elle eût