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LES EXILÉS

Sémélè ! Toi, puissant Bacchos aux yeux affables
Ceint de feuillages, né sur des lits ineffables !
Guerrier au front mitré, Dieu rugissant et doux,
Ô toi qui meurs pour nous et qui renais en nous !
Vous, Charites aux noms illustres, florissantes
Dont le fauve soleil dore d’éblouissantes
Parures de rayons les cheveux dénoués !
Euménides ! qui sur vos beaux fronts secouez
Des serpents agitant sinistrement leurs queues,
Et qui regardez l’eau du Styx ! Déesses bleues,
Écoutez la Cithare ! Ô Démons redoutés !
Esprits des bois et des fontaines, écoutez
La Cithare ! Écoutez le cri de sa victoire !
Viens, écoute-la, Nuit sainte à la splendeur noire !
Écoute-la, splendide Éôs, qui sur les lys
Mets ta rose lumière ! Écoute-la, Thémis.
Écoutez-la, vous tous, Dieux ! Et vous, Muses chastes !
Et vous, Nymphes qui dans les solitudes vastes
Éparpillez dans l’air votre chant innocent,
Courant obliquement et vous réjouissant
Des antres ! qui prenez vos caprices pour guides,
Et, rieuses, marchez par des chemins liquides !
Ô Vierges qu’on admire en vos jeux querelleurs
Et dont les jeunes fronts sont couronnés de fleurs !
Vous tous, Guerriers, Démons bienfaisants, Rois fidèles !
Vous dont chaque pensée errante en vos prunelles
Contient l’éternité sereine d’une Loi,
Écoutez la Cithare, où gronde avec effroi