Page:Banville - Petit Traité de poésie française, 1881.djvu/140

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syllabes, dit Génin, est l’ancien vers épique, le véritable vers des chansons de geste ; l’alexandrin n’y a été employé qu’à la seconde époque, au commencement du xiiie siècle : ce fut une innovation dont le premier exemple paraît être le roman d’Alexandre, par Alexandre de Bernay ou de Paris. Les poèmes authentiques du xiie siècle, comme Guillaume d’Orange et la Chanson d’Antioche, sont en vers de dix syllabes. S’il s’y trouve çà et là un vers de douze, c’est par inadvertance du copiste ou du poète. »

Après ces trop incomplètes remarques sur l’Épopée, j’ai peu de chose à dire du Poëme proprement dit, car ici les exemples sont tout, et il suffit de lire Albertus et La Comédie de la Mort de Théophile Gautier, les Romances du roi Rodrigue d’Émile Deschamps, Éloa d’Alfred de Vigny, Namouna d’Alfred de Musset, pour comprendre que le Poëme peut aborder tous les sujets, prendre tous les tons, s’exprimer en alexandrins ou en vers lyriques, demander son inspiration à toutes les mythologies, à toutes les légendes et à toutes les histoires, qu’enfin son domaine est infini, et que l’inspiration du poète est, dans ce genre de composition, le seul générateur du style qu’il adoptera.