Page:Banville - Petit Traité de poésie française, 1881.djvu/175

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Couché sous tes ombrages vers,
          Gastine, je te chante
Autant que les Grecs, par leurs vers,
          La forest d’Érymanthe :
Car, malin, celer je ne puis
          À la race future
De combien obligé je suis
          À ta belle verdure.
Toy qui, sous l’abri de tes bois,
          Ravy d’esprit m’amuses ;
Toy qui fais qu’à toutes les fois
          Me respondent les Muses ; etc.

Ronsard. À la Forest de Gastine. Odes, Livre II, XV.


Il n’y a là pas autre chose que des strophes de quatre vers, dont l’aspect matériel est défiguré par un artifice typographique. En imaginant ce prétendu rhythme, Ronsard a été égaré par le désir de reproduire l’aspect de certaines odes d’Horace, et il a oublié que dans notre versification dont la Rime est l’âme essentielle, les diverses parties d’une ode ne sont liées entre elles que si elles sont liées parla rime.

À ce propos, il faut bien que je signale la gaminerie (il n’y a pas d’autre mot à employer) par laquelle Alfred de Musset, dans son merveilleux poëme Mardoche, écrit en vers alexandrins à rimes plates, s’amusa à séparer le texte, de dix en dix vers, par des chiffres romains, comme si la strophe lyrique pouvait se créer par le même procédé qui sert à diviser une galette en un cer-