Page:Banville - Petit Traité de poésie française, 1881.djvu/296

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Franciade, mais nous en parlons bien à notre aise dans un siècle où la Critique, parvenue à son âge viril et appuyée sur des renseignements innombrables, découvre enfin les solutions les plus ardues ! La chaîne des vérités est dans nos mains et se déroulera sans effort, mais qu’il a fallu de peines pour en découvrir le premier anneau ! Grâce aux investigations de poètes critiques, dont les travaux si vastes nous permettent d’embrasser à la fois et d’un seul coup d’œil toute rhistoire de l’art, le plus mince écolier sait aujourd’hui quels obstacles invincibles s’opposent à l’éclosion d’un poëme épique en dehors des âges primitifs d’un peuple, et comment, si, par impossible, nous devions tenter de créer aujourd’hui une épopée française, ce serait en remontant aux poèmes d’Arthur ou à ceux du cycle carlovingien. Placé à la tête d’une pléiade qui avait pris pour sa devise le mépris du profane vulgaire, entouiié d’érudits qui se préoccupaient des origines troyennes de la France, Ronsard put croire à la nationalité de son sujet ; et, à cette cause d’illusion se joignait l’orgueil de race, car une des branches de sa famille habitait encore non loin de Sycambre, où il fait aborder son héros Francion. Son épopée eût-elle été acceptable, il lui aurait encore manqué, pour la mener