Page:Banville - Théophile Gautier, ode, 1872.djvu/16

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Ta barbe légère et farouche
Tombait, soyeuse, en s’effilant,
Pour encadrer ta belle bouche
Aussi rouge qu’un fruit sanglant,

Et comme au Zeus de l’ode ancienne
Qui songe aux éternels devoirs,
Ta chevelure ambroisienne
Ruisselait en brillants flots noirs.

Sur ton large visage austère
Quelle douceur, mais quel mépris
Pour tous les hochets de la terre
Auxquels on attache du prix !

Rhéteurs aux démarches hautaines
Bâtissant un néant profond,
Et se penchant vers les fontaines
Pour remplir des urnes sans fond ;

Orateurs dévorés de fièvre,
Dans le carrefour éhonté
Baisant de leur ardente lèvre
L’ignoble Popularité ;