Page:Barbey d'Aurevilly-Les diaboliques (Les six premières)-ed Lemerre-1883.djvu/196

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que donnerait un serpent qu’on verrait se dérouler et s’étendre, sans faire le moindre bruit, en s’approchant du lit d’une femme endormie… Un soir que la comtesse lui demanda d’aller chercher je ne sais plus quoi, je pris occasion de sa sortie et de la rapidité, à pas légers, avec laquelle elle l’exécuta, pour risquer un mot qui fît peut-être jour :

« — Quels pas de velours ! dis-je, en la regardant sortir. Vous avez là, madame la comtesse, une femme de chambre d’un bien agréable service, à ce que je crois. Me permettez-vous de vous demander où vous l’avez prise ? Est-ce qu’elle est de V…, par hasard, cette fille-là ?

« — Oui, elle me sert fort bien, — répondit indifféremment la comtesse, qui se regardait alors dans un petit miroir à main, encadré dans du velours vert et entouré de plumes de paon, avec cet air impertinent qu’on a toujours quand on s’occupe de tout autre chose que de ce qu’on vous dit. — J’en suis on ne peut plus contente. Elle n’est pas de V… ; mais vous dire d’où elle est, je n’en sais plus rien. Demandez à M. de Savigny, si vous tenez à le savoir, docteur, car c’est lui qui me l’a amenée quelque temps après notre mariage. Elle avait servi, — me dit-il en me la présentant, — chez une vieille cousine à lui, qui venait de mourir, et elle était restée sans place. Je l’ai prise de confiance, et