Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 1.djvu/115

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complications ; agissant, en cela, comme les plus grands diplomates, qui, contrairement à la réputation qu’on leur fait, ne rusent presque jamais, mais l’emportent, dans toute affaire, par la netteté de leur décision. Au fond, elle estimait beaucoup M. de Marigny, sans raison tirée des faits extérieurs, mais d’intuition, de pressentiment, à la manière des femmes qui ont du tact. Sur des organisations d’un ordre élevé, Marigny ne manquait jamais d’agir avec une énorme puissance. Il n’avait d’ennemis que les gens vulgaires. Même physiquement, il les choquait. Oh ! mon Dieu, oui ! il les choquait, ces délicats ! Il fallait les entendre. On le critiquait dans sa mise, dans sa physionomie, dans sa personne extérieure, — la pire critique pour les gens du monde. Quoi d’étonnant ? Avec les mœurs égalitaires et jalouses de notre temps, il y a des physionomies qu’on voudrait briser comme une couronne. C’est de la royauté de droit si divin pour cette plèbe qui n’y croit plus ! M. de Marigny avait l’éclatant malheur et le danger d’une de ces physionomies réparties non seulement dans les traits de la face, mais dans le corps, les attitudes, l’être tout entier. Aussi, qu’on écoutât les commères, mâles et femelles, qui imposent leur jargon aux opinions des salons de Paris, que ne disait-on pas de lui ?