Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 1.djvu/187

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

voici le pendant et le contraste de cette célèbre aventure. Voici une demoiselle d’Espagne qui va donner à la grande dame Anglaise une leçon de moralité ! Regardez !

« — Par la mort, c’est la Malagaise ! — s’écria Alfred de Mareuil stupéfait. — Voilà qui est de plus en plus incompréhensible ! Quelle diable de haine enragée avez-vous allumée dans cette femme-là ? Cela passe toute proportion connue ; mais, je l’avoue, cela commence à me révolter. Oui, d’honneur, j’ai beau être amoureux d’elle, un pareil acharnement ne l’embellit pas. C’est odieux ! Et sir Reginald — dit-il encore — qui consent à prendre sa femme pour témoin dans une affaire aussi sérieuse ! Ces Anglais ! Poussent-ils loin l’excentricité ?… J’ai envie de déclarer à ces messieurs ce qu’il en est, et de protester contre l’inconvenance de la présence d’une femme ici.

« — Gardez-vous-en bien, — répondis-je. — J’ai eu la même pensée que vous hier, quand sir Reginald m’a proposé le combat, place tenante ; mais aujourd’hui, non ! Jugeons cette femme. Allons jusqu’au bout. Sachons le mot de l’énigme, s’il y en a un. Et puisque la fille du toréador a soif de sang, qu’elle le voie couler !

« Je la regardais en parlant ainsi. Je n’en pouvais ôter ma vue. Était-ce une illusion der-