Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/119

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se présentait à eux de manière à ne pouvoir pas, sans affectation, l’éviter.

— « M. de Prosny avait raison, — dit Hermangarde ; — il avait mandé à madame d’Artelles que madame de Mendoze était à son château de la Haie d’Hectot. »

Elle dit cela, simplement pour ne pas se taire ; car se taire, après cette rencontre, eût été plus que de parler. Elle ne voulait point faire croire à son mari qu’elle devinait ses pensées secrètes et qu’elle pouvait en souffrir. Elle craignait d’ajouter, par une réflexion sur l’état affreux de l’agonisante comtesse, à l’espèce de remords qu’elle soupçonnait à Ryno. Elle l’aimait assez et elle était assez bonne pour les partager, ses remords, elle qui n’était pas coupable et qui entendait crier dans son cœur : « Voilà pourtant avec quoi le bonheur dont tu jouis a été fait ! »

Ryno ne répondit pas. Il ne pensait pas à madame de Mendoze. Il pensait à l’autre… à Vellini. Comment se trouvait-elle dans le coupé de la comtesse ? Pourquoi cette femme, quittée volontairement et de son plein gré à elle-même, venait-elle se placer à quelques pas de lui dans la vie ? Dans quel dessein et dans quel but ? Marié, il avait prouvé, par le plus dur silence, qu’il ne l’aimait plus et qu’il n’aimait réellement qu’Hermangarde ; mais alors, pour