Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/141

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une insensée. Elle partit à quelques jours de là pour cette Normandie où tu étais. Moi, restée derrière toi et qui n’écris jamais, je t’écrivis. Tu ne répondis pas. Paris me devint insupportable. J’y mourais… asphyxiée. Cérisy se ruinait pour me distraire et n’y parvenait pas. Je pris mon parti, laissai Oliva rue de Provence, et je tombai un matin chez madame de Mendoze. « Il faut que je revoie Ryno, — lui dis-je. — Si vous ne me voulez pas chez vous, j’irai ailleurs. » Malheureuse, mourante, n’ayant personne : « Vous assisterez à mes derniers moments, » me dit-elle, et elle m’accepta. Cela m’a touchée. Au fond, Vellini n’est pas une mauvaise fille. Je devins sa garde-malade. Turbulente, maladroite, mauvaise garde-malade qui lui casse tout, mais qui du moins sait la porter de son lit à son canapé, sans lui faire mal ! »

Marigny, appuyé sur son fusil, écoutait en silence, ému deux fois, et pour celle qui mourait et pour celle qui était là, vivante, et qui reprenait son prestige en lui racontant, de ce tour naturel et rapide qui n’était qu’à elle, comment elle connaissait madame de Mendoze. Nature libre des convenances comme nos mœurs les ont faites, et sautant toujours pardessus… sans même les toucher !

— « Hier, comme elle était un peu mieux