Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/20

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

polies de son respect ; c’était enfin cette attitude d’aventurier qu’il affectait dans le monde, comme si, ne relevant que de lui-même, il aimât à trancher sur le fond des hommes, nés comme lui, qui se réclament de leur naissance et de leurs relations. À présent, avec ses quatre-vingt mille livres de rente que la plus belle fille de France lui a apportées dans la queue de sa robe, ce n’est plus qu’un magnifique gentilhomme, d’un très grand aplomb et de très grandes manières, mais tempérées par l’amabilité d’un sentiment délicieux qui crée au dedans et au dehors de soi une inexprimable harmonie. Quelle magie que celle du bonheur ! Quel velouté il met sur toutes choses ! Et comme l’homme, pour peu qu’il soit de noble origine, s’accomplit quand il aime et qu’il est heureux !

« Inutile de vous dire, mon cher vicomte, le ravissement de la marquise. Elle est aux anges. Sa joie de sentir Hermangarde l’objet de soins qui ressemblent plutôt à un culte qu’à une suite d’attentions passionnées, est doublée par la surprise que j’ai éprouvée en voyant les choses tourner d’une façon si opposée à mes prévisions et à mes craintes. Elle triomphe deux fois. Quoiqu’elle ait toujours été plus heureuse que moi, et que ce pauvre marquis de Flers l’ait aimée avec un dévoue-