Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/277

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Ryno et Vellini s’assirent sur ce banc oublié, qui avait vu sans doute, à quelque soir, sur ces planches tremblantes et verdies, plus d’une belle fille de douanier, entraînée par un fraudeur amoureux, qui, ce soir-là, faisait deux fois la fraude, en faisant l’amour avec elle. Aujourd’hui, il s’y asseyait un couple encore mieux approprié au caractère de cette grotte presque inaccessible, retirée, noire, profonde, si bien créée pour jeter son ombre dans l’abîme de deux cœurs, vides des jeunes sensations de l’amour, mais pleins du ferment des souvenirs et de leur redoutable ivresse.

— « Ryno, — dit Vellini avec un sourire qui cachait dans sa gaieté une tristesse, — voilà notre boudoir à présent ! C’est ici qu’il faudra nous voir désormais. Tu ne peux plus revenir au Bas-Hamet. Tu éveillerais les soupçons jaloux d’Hermangarde. Or, plus que jamais, puisque

    pagnes où l’on combattit, Quintal est un de ces hommes, obscurs et grands, dont la gloire de deux jours n’a pas payé la vie. Ces Chouans, qui avaient dans leurs rangs plus d’un Redgauntlet digne du pinceau d’un Walter Scott Normand ou Breton ; ces Aigles de nuit qui se ralliaient au cri des chouettes, attendent encore leur historien ou leur romancier. Nous avons déjà commencé de le devenir (voir notre Ensorcelée et notre Chevalier Des Touches), et nous continuerons de retracer une des époques de l’histoire moderne qui devrait le plus inspirer l’imagination des conteurs.

    (Note de l’auteur.)