Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/32

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Elle ne s’assit pas… mais, avec cette curiosité que les femmes qui ont de l’usage cachent très bien sous un air très simple :

— « Comme la mer monte ! — dit-elle, en allant jusqu’à la croisée et en y restant quelques secondes, le front collé à la vitre.

— Oui, — répondit madame de Flers, — c’est grande marée. M. de Marigny n’aura pas pensé à cela. Où est-il allé avec sa femme ? S’ils tardent beaucoup, le pont de là-bas sera couvert et ils seront obligés de revenir par eau.

— Vous n’êtes pas inquiète toujours ?… » fit la comtesse en se retournant. Et son œil de faucon tomba sur la lettre que tenait la marquise, mais le cachet et l’adresse n’étaient pas distincts dans le mouvement qu’imprimait à la missive la main qui l’agitait, et elle ne vit rien… de ce qu’elle voulait voir.

Un autre jour, elle n’eût pas eu cette curiosité, indigne des habitudes élevées d’une femme comme elle, mais elle avait remarqué, en entrant, le visage altéré de son amie, sur lequel la placidité intelligente d’un esprit apaisé depuis longtemps et la réverbération du bonheur d’Hermangarde versaient habituellement une sérénité infinie.

Madame d’Artelles supposait sans doute qu’il y avait un rapport secret entre la lettre de la