Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/31

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— Moi ! — répondit madame d’Artelle. — J’étais à écrire et je m’y suis oubliée. Pardonnez-moi, ma chère amie ; j’aurais dû savoir que vous étiez descendue et seule, car il est trop bonne heure pour qu’Hermangarde et M. de Marigny soient rentrés.

— Ah ! ma chère, liberté complète, — reprit la marquise. — J’ai toujours eu le respect de l’indépendance de ceux que j’aime. Je serais un fléau d’amitié si je ne pouvais vous céder, même pour une heure, à notre cher vicomte de Prosny.

— Oui, c’est à lui que j’écrivais, — dit madame d’Artelles. — Croyez-vous qu’il ne m’a pas écrit une seule fois depuis notre départ de Paris ? Il est bien de la plus insupportable lenteur !

— C’est une tortue épistolaire, — répliqua la marquise, — et vous aurez beau faire, ma chère comtesse, vos reproches les plus acérés ne traverseront pas son écaille. S’il éprouve la même difficulté de commencer ses lettres que de finir ses phrases, ce doit être un aimable correspondant.

— Dites tout ce que vous voudrez de lui ! — fit madame d’Artelles, en roulant sa bergère auprès de son amie. — Je suis trop mécontente de sa paresse pour le défendre contre vous. »