Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/373

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

marqué, d’un air presque scandaleusement dégagé. Une expression d’ironie retenue circulait dans le rictus de ses lèvres.

— « Eh bien, ma chère comtesse, — lui avait-il dit sans lui demander de ses nouvelles, et en lui baisant la main avec autant de distraction que si c’eût été une bague d’évêque et non la main d’une femme qu’il avait aimée autrefois, — prendrez-vous maintenant de mes almanachs ?

— Que voulez-vous dire avec vos almanachs ? — répondit madame d’Artelles, qui travaillait à son éternel filet, — et quelle mouche vous a piqué, monsieur de Prosny ? Vous dansez comme si c’était une tarentule ! On dirait que vous allez vous envoler.

— Pour vous prouver que non, je m’assieds, » fit-il, en s’affaissant dans une bergère. Sa badine, cette canne de muscadin, qui survivait à tous les badinages de sa trop badine jeunesse, vibrait entre ses jambes qu’il croisa, mais avec un mouvement qui sentait la superbe d’un triomphateur.

— « Ce que je veux dire, comtesse, c’est que mes prédictions sont accomplies ! — reprit-il d’un air solennel, mettant des pauses entre chaque mot comme s’il eût acclamé sa gloire, et poussant sa joue avec sa langue, en étudiant l’effet qu’il produisait sur madame