Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/374

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d’Artelles. — Après dix-huit grands mois d’incertitudes, je viens à l’instant même d’acquérir la preuve d’une chose que j’avais depuis bien longtemps prévue et calculée, comme on calcule une éclipse. Au fait, c’est une éclipse aussi ! Le parangon des maris, M. de Marigny…

— M. de Marigny ?… — fit la comtesse, la tête levée et avec un point d’interrogation dans le regard.

— A fait comme le chien de la Bible, comtesse ! — dit de Prosny. — Il est retourné… vous savez bien où.

— Mais c’est fort malpropre, ce que vous dites là, vicomte ! — répondit madame d’Artelles, qui savait sa Bible et qui allait parfois au sermon.

— Mais dire n’est pas faire ! — dit le vieux cynique ; — et moi je ne me charge que de vous apprendre une chose que vous caractériserez, quand vous la saurez, comme il vous plaira. Voyons ! — ajouta-t-il en tirant sa montre et en la comparant à la pendule, — il est juste dix heures trois quarts. Où croyez-vous qu’est à cette heure M. de Marigny, ce génie de l’amour conjugal, éclos, par miracle ! dans la peau sulfurique d’un libertin ?…

— Ah ! mon Dieu ! — fit madame d’Artelles, — ma pauvre amie, la marquise de Flers, aura donc bien fait de mourir ?…