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pied des ajoncs, — puis sous Saint-Georges, — paroisse au patron moitié Anglais, moitié Normand, — et enfin va se perdre à plus d’une lieue de là, jusque sous Portbail. C’est, à proprement parler, le côté fier et beau de Carteret, le côté cher aux organisations poétiques. Cette mer qui se prolonge à votre droite devant vous, cette immensité de sable que le vent roule, par places, en dunes assez épaisses et assez hautes pour que le douanier — la vedette de la côte — puisse y creuser une hutte contre la nuit et le mauvais temps, à votre gauche, — fermant l’horizon, à l’Est, comme la mer le clôt au couchant, — les toits bruns de Barneville et la tour carrée de son clocher singulier, qui a peut-être soutenu des sièges : tout cet ensemble un peu austère, mais grandiose, doit captiver les imaginations rêveuses. Par un soir brumeux de l’automne, quand la mouette mêle, en criant, son aile frissonnante à la vague, quand la mer est rauque et houleuse, la pâle Minna de Walter Scott pourrait venir attendre son Cleveland sur l’âpre sommet de cette falaise, aux cavernes visitées des flots, et se croire encore aux Hébrides.

Mais en suivant la ligne du havre et on tournant le dos à la mer, la scène change et prend un autre caractère. On ne va pas bien loin sans trouver le village, bâti dans des sa-