Page:Barbey d’Aurevilly – Le Chevalier Des Touches, 1879.djvu/197

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pai à son bras le bracelet que lui avait tressé Aimée, de ses cheveux plus purs que l’or, et dont le sang qui le couvrait allait faire pour elle une relique sacrée. Sans prêtres, loin de tout, nous lui rendîmes le seul honneur que des soldats puissent rendre à un soldat, en le saluant une dernière fois du feu de nos carabines, et en parfumant le gazon, sous lequel il allait dormir, de cette odeur de la poudre qu’il avait toujours respirée !

— Il n’est pas à plaindre, dit M. de Fierdrap, qui crut répondre à la pensée secrète de mademoiselle de Percy. — Il est mort de la mort d’un Chouan et il a été enterré au pied d’un buisson, comme un Chouan, sa vraie place ! tandis que Des Touches, que l’abbé vient de voir sur la place des Capucins, est probablement fou, errant, misérable, et que Jean Cottreau, le grand Jean Cottreau, qui a nommé la chouannerie et qui est resté seul de six frères et sœurs, tués à la bataille ou à la guillotine, est mort, le cœur brisé par les maîtres qu’il avait servis, auxquels il a vainement demandé, pauvre grand cœur romanesque, le simple droit, ridicule maintenant, de porter l’épée ! L’abbé a raison : ils mourront comme les Stuarts.

Mademoiselle de Percy n’eut pas le courage de protester une seconde fois contre l’opinion de ces blessés de la fidélité atteints au cœur,