Page:Barbey d’Aurevilly – Le Chevalier Des Touches, 1879.djvu/199

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talons, il devait avoir hâte d’être délivré du poids écrasant de ses fers ! Tout à l’heure, il faudrait reprendre notre route, et lui, libre, serait un fier soldat de plus, si nous étions attaqués, d’aventure, dans notre retour à Touffedelys. Nous essayâmes donc de forcer et de rompre toute cette ferraille ; mais, n’ayant que nos couteaux de chasse et les chiens de nos carabines, une telle besogne menaçait d’être longue et peut-être impossible, quand un de ces hasards comme il ne s’en rencontre qu’à la guerre nous tira de l’embarras dans lequel nous nous trouvions alors.

— Ah ! c’est l’histoire de Couyart ! dit en se remuant voluptueusement dans sa bergère mademoiselle Sainte de Touffedelys, comme si on lui avait débouché sous le nez un flacon de l’odeur qu’elle eût préférée.

On voyait que cette histoire, dont l’héroïsme n’agitait pas beaucoup son cervelet, tombait enfin dans des proportions qui lui plaisaient. Tout est relatif dans ce monde. Le temps avait croisé le cygne des anciens jours d’une pauvre oie, qui n’eût pas sauvé le Capitole. Mademoiselle de Touffedelys s’était presque animée… Couyart était son horloger.

— Il est venu encore ce matin remonter la pendule, dit profondément cette observatrice ineffable.