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IV

Cette époque fut la plus heureuse pour les personnes de cette histoire. Madame de Scudemor avait recouvré cette tranquillité noble qui se reflétait d’une manière frappante dans toute sa personne. Mais elle languissait toujours de cette souffrance qu’elle avait rapportée d’Italie, et que les médecins ne caractérisaient pas. Elle était douce avec cette souffrance. Les maux de l’âme lui avaient appris à ne pas s’inquiéter de ceux du corps. Elle n’était pas de ces amabilités fragiles qui ne résistent pas à une migraine ou à une entorse. De peur d’être importune aux autres, cette égoïste qui n’aimait rien, comme disait le monde, savait leur sourire par dessus sa douleur.

Si Allan n’avait pas aimé autrefois madame de Scudemor, s’il avait toujours été pour elle ce qu’il était maintenant, il aurait savouré sans trouble les exquises douceurs du moment actuel ; mais le passé, mais les souvenirs, mais des craintes venaient l’agiter au sein de cette paix infinie qu’il n’avait pas soupçonnée, et devaient influer, à son insu peut-être, sur le sentiment qu’il avait pour Camille et qui aurait été de nature à la rendre heureuse, car les affections ne sont