Page:Barbey d’Aurevilly - L’Amour impossible, La Bague d’Annibal, Lemerre.djvu/197

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


VI


Joséphine n’était donc ni belle ni jolie… Mais on sentait que, deux jours après l’avoir vue, on pouvait l’aimer comme un fou. Elle s’enfonçait doucement dans l’imagination, et puis elle y restait. Elle ne produisait jamais cette mystérieuse sympathie qui s’établit tout à coup entre deux cœurs comme un courant électrique, magnétisme subtil et caché, le coup de foudre du dix-huitième siècle. — Non ! elle commençait par laisser froid ou déplaire ; mais, à la voir un peu davantage, elle déplaisait déjà moins, — et enfin, — enfin l’amour éclatait plus fort de tout le temps qu’il avait mis à naître. — J’ai toujours cru les êtres impressifs à la façon de Joséphine plus dangereux que ceux qui produisent l’ivresse nerveuse au premier regard.