Page:Barbey d’Aurevilly - Le Cachet d’onyx, Léa, 1921.djvu/71

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Réginald n’aurait pas résisté à faire un aveu, à essayer, par un dernier effort, s’il ne découvrirait pas un sentiment qui retentît faiblement au sien, quand Mme de Saint-Séverin entra tout à coup dans le salon. — Sa figure prit l’expression du mécontentement en apercevant Réginald et Léa, tous deux seuls.

« Maman, Réginald est souffrant, — dit Léa ; — gronde-le donc un peu de ne pas s’être plaint. »

Mme de Saint-Séverin interrogea Réginald sur sa souffrance avec un regard si pénétrant qu’il balbutia quelques réponses assez incohérentes. Il lui sembla qu’il n’y avait plus rien de bienveillant dans l’accent inquiet de cette femme qu’il avait toujours connue affectueuse et bonne.

« J’ai besoin d’être seule avec Réginald, — dit-elle à sa fille. — Ma Léa, descends sur la terrasse. »

L’adolescente obéit, muette et non pas contrariée. La contrariété n’est que le premier degré de la douleur ; mais pour l’éprouver, encore faut-il avoir une ombre d’intérêt dans la vie.

« Oui, Réginald, j’ai à vous parler, — reprit Mme de Saint-Séverin quand Léa fut sortie. Et il y avait une espèce de solennité dans ces