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Page:Barbey d’Aurevilly - Les Bas-bleus, 1878.djvu/16

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passaient pour prophétesses, la pressentent et pour leur compte, la provoquent, en la demandant.

Et ce n’est pas d’hier qu’elles l’ont demandée. Ce n’est pas d’hier que l’idée d’égalité, en dehors du Code, s’est mise à poindre dans tous les horizons ; puis, par degrés, à insolemment rayonner. Bien avant ce célèbre club des femmes, organisé en 1848, et si ridiculement fameux ; bien avant les publications de Mme Olympe Audouard, qui demande même des droits politiques, Mme Audouard, la plus avancée des révolutionnaires féminines ; la Marat couleur de rose du parti, et que je ne tuerais pas dans sa baignoire ; bien avant toutes ces tentatives animées dont ont pu rire quelques esprits aristophanesques, quelques attardés dans leur temps, qui ont encore dans le ventre de l’ancien esprit français, car nous portons malgré nous en nos veines quelque chose des mœurs de nos pères, l’idée d’égalité, qui pénètre tout, avait pénétré la perméable substance de l’esprit des femmes, et traversé, sans grande peine, la pulpe de pêche de ces cerveaux.

Mme de Staël qui commence le siècle, Mme de Staël qui avait pour Napoléon une haine de femme dédaignée, et qui, naïvement, se croyait, en femme, ce que l’Empereur était, en homme, Mme de Staël avait devancé et deviné Saint-Simon avec son pape et sa papesse égalitaires… Quoique mort sans papesse, en effet, le saint-simonisme en marqua la place dans sa hiérarchie ; et par cela seul qu’il la marqua, il fut tout de suite et il est resté une des causes les plus actives du remue-ménage qui s’est produit dans l’esprit et la vanité des femmes de ce temps, enragé de tous les genres d’émancipation. Ce qui n’avait été qu’à l’état de haute aspiration personnelle, dans Mme de Staël, prit tout à coup, sous l’action du saint-simonisme, l’impérieuse généralité et la décision incisive du dogme.

À deux ou trois ans de la prédication saint-simonienne, parurent les premiers romans de Mme Sand qui