y croit. Il peut donc un jour être détrompé. Fatigué d’une étreinte si vaine, il peut un jour prendre dans ses bras autre chose que cette nuée et produire une œuvre vivante. Il a de la force, de la volonté, de la réflexion, et même dans des proportions assez viriles, tandis que M. Taine, esprit frivole, ne croit absolument à rien, se moque de tout, et ne changera pas. M. Taine n’est pas seulement un athée de la grande manière : il l’est de la petite ; il l’est de toutes. C’est l’athée pur. Il l’est envers Dieu et envers les hommes, — n’admettant que lui-même et sa propre plaisanterie. Or, puisqu’il s’agit de cela et pour le dire en passant, nous ne croyons pas beaucoup aux ravages de la plaisanterie de M. Taine. Ses Philosophes français sont un éclat de rire dans l’eau. On n’est pas un serpent pour souffler dans une clef forée ! M. Doublet, lui, qui ne souffle que de fatigue, est au moins un esprit de bonne foi et d’acharnement dans la recherche. Mécontent (on le conçoit très-bien !) de ne rien comprendre aux philosophies contemporaines, il est descendu en lui-même pour y chercher l’affirmation qui ne s’y trouve pas, mais là précisément a été le mal : il est descendu en lui-même, comme les philosophies contemporaines. Il s’est jeté dans la psychologie, le puits de l’abîme pour les philosophes, « la cave de M. Maine de Biran », comme dit M. Taine, — et il y est resté.
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