Page:Barbey d’Aurevilly - Les Philosophes et les Écrivains religieux, 1860.djvu/36

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qu’il ne fallait mépriser le secours de personne. Ils ont accueilli M. Jean Reynaud comme si c’était Pythagore. Ils ont écouté sérieusement cet écho attardé, que Pythagore, s’il l’entendait, n’adorerait plus ! Et, quitte à se moquer, plus tard, d’un livre qui doit faire mat aux nerfs de leurs esprits positifs et légers, ils ont poussé au succès de ce livre, en disant bien haut qu’il le méritait !

Tel est tout le secret de cette facile renommée de deux jours, faite si généreusement à un ouvrage qui ne saura pas la garder ! Le livre de Terre et Ciel de M. Jean Reynaud est un coup porté, par une main philosophique de plus, au christianisme et à l’Église. Comment ceux qui haïssent l’Église et le christianisme n’en seraient-ils pas reconnaissants ?… Sans doute, avec plus de talent, le coup serait mieux asséné ; mais, enfin, — il faut être juste ! — c’est un coup de plus ! M. Jean Reynaud a un mérite que les philosophes doivent singulièrement apprécier, et qui ne tient ni à ses idées ni à la force de son génie. De tous les ennemis de la religion de nos pères, de tous ceux qui disent que le catholicisme est une doctrine dépassée par l’esprit humain et qui a fait son temps (comme les conscrits) dans l’histoire, cet excellent M. Jean Reynaud est peut-être le plus dangereux. Il est doux et il se dit chrétien. C’est au nom d’un christianisme meilleur qu’il vient poser la nécessité de corriger ce chétif symbole de Nicée, qui, décemment, ne convient plus à des chrétiens aussi distingués que nous. M. Jean Reynaud, quand il parle du christianisme, affecte une impartialité, à duper beaucoup d’imbéciles. Il ne casse pas tout, comme M. Proudhon. Il n’a pas le talent