Page:Barbey d’Aurevilly - Les Poètes, 1862.djvu/13

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qu’à l’état fragmentaire. Cette métaphysique, nécessaire jusqu’ici, a manqué.

Ce n’est pas le livre que nous publions aujourd’hui qui la fera. Cependant, pour les esprits réfléchis ou chercheurs, il y aura peut-être toute une poétique à dégager de ce premier volume sur les Poètes du XIXe siècle. Mais qu’on m’entende bien, une poétique n’est un traité de la poésie qu’en littérature. Or la poésie n’est pas seulement que dans l’expression littéraire. Elle est dans les arts. Elle est dans la nature. Elle est en toutes choses ; — en toutes choses, si abjectes soient-elles ou paraissent-elles l’être aux esprits prosaïques ou vulgaires. Il ne s’agit que de frapper juste toute pierre, si roulée et même si salie qu’elle soit dans les ornières de la vie, pour en faire jaillir le feu sacré ; seulement, pour frapper ce coup juste, il faut la suprême adresse de l’instinct qui est le génie, ou l’adresse de seconde main de l’expérience, qui est du talent plus ou moins cultivé.

Eh bien ! ce sont ces esprits frappeurs, dans l’ordre littéraire, qui viennent à leur place aujourd’hui dans la vaste composition que nous avons entreprise des Œuvres et des Hommes au XIXe siècle. Parmi les artistes qui, sous toute forme et dans toute œuvre, arrivent à ce degré de profondeur et d’intensité qui est