Page:Barbey d’Aurevilly - Les Poètes, 1862.djvu/86

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croyait-il, que de se resserrer, que de se tasser dans un petit espace, et où l’idée panthéistique lui a imposé un horizon qui n’est pas l’Infini encore, — cette sphère où toute grande poésie doit franchement monter, — mais qui pourtant parle déjà d’Infini à la pensée, comme la jonction lointaine de la terre et du ciel, qui est une limite aussi, nous en parle silencieusement, le soir. Or ce progrès n’est pas le seul dans le livre de M. Gautier. Il en est d’autres, mais c’est le premier. Voici le second !

III

Nous avons dit que M. Théophile Gautier représentait glorieusement l’école volontaire de la poésie travailleuse et, qu’on nous permette le mot, rageuse au travail, qui pose assez insolemment pour soi-même et pour le génie, que la Poésie est le résultat d’une poétique, la langue touchée, de telle ou telle façon, comme un piano, et qui croit simplifier et réaliser tout par des règles. M. Gautier, en veine de paradoxe (mais forcer sa pensée, ce n’est par la trahir ! ), a prétendu parfois qu’il pouvait faire un poète comme Brard et Saint-Omer font des calligraphes ! Il ne l’a cependant pas fait, ce poète-là, et nous le demandons et l’attendons toujours. Mais nous admettons cette forme vive pour ce qu’elle veut dire, et elle veut dire qu’on trouve l’expression quand on la cherche, l’expression, ce don gratuit de Dieu, et quand on ne l’a pas, de nature, qu’on peut très-bien, ma foi ! se la créer !