Page:Barbey d’Aurevilly - Les Poètes, 1889.djvu/103

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de bureau sculpté par Froment-Meurice, entre les œuvres de Ronsard, de Desportes et d’un autre auteur qu’imite Hugo et qui s’appelle Hugo… Certainement, je ne le crois pas. L’esprit du lecteur est plus facile à rompre ou à faire grimacer que ce fil de la Vierge auquel j’ai comparé le vers de Victor Hugo, et toutes les énormités que ce vers merveilleux porte légèrement, l’esprit du lecteur les rejettera de fatigue et de peur d’en être écrasé.

Car l’Énormité, voilà l’écueil de Victor Hugo… L’écueil, pour les poètes comme pour les rois, vient de trop de puissance… Dans cette double pièce de vers intitulée le Cheval qui commence et finit ce volume, d’une composition si peu surveillée qu’on y trouve une pièce qu’on dirait oubliée de la Légende des Siècles, — un Souvenir des vieilles guerres ; dans cette pièce de vers où le poète, pour faire du neuf à bon marché, a démarqué le linge de Boileau (procédé peu fier pour le chef de l’école romantique) et appelé Pégase un cheval au lieu de l’appeler bravement cheval, Hugo, enchaîné à ce mot d’énorme comme le coupable à l’idée de son crime, adresse à Pégase ce vers singulier :

Ta fonction, c’est d’être énorme !

et dans ce seul mot il s’est révélé lui-même tout entier. Il a dit ce qu’il est et par quoi il est, mais aussi ce par quoi il périt… Oui ! la fonction de Hugo est d’être