Page:Barbey d’Aurevilly - Les Poètes, 1889.djvu/145

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Iambes n’en révélait rien. Nulle infériorité de détail n’y trahissait l’effort du poète. Aussi fut-ce alors pour Barbier une entrée d’artiste consomme dans la gloire. Talma n’avait pas été plus beau lors de sa fameuse entrée en scène dans Hamlet ! C’était là une illusion, un bien joué sans doute : les Minerves tout armées ne sortent de la téte des Jupiters que dans les Mythologies. Mais cette illusion grandissait le poète et son œuvre…

Eh bien, il n’a pas voulu nous la laisser ! C’est cette illusion que le volume des Silves a détruite. On y trouve beaucoup de pièces d’avant la Curée, que l’auteur gardait en portefeuille, qu’il aurait bien dû y laisser, et qu’il a publiées pour ne rien perdre. Vous figurez-vous, après l’exécution toute-puissante des plus fiers morceaux, ces misérables préludes, attardés et ânonnants ? Le poète ne semble-t-ilpas dire : « Tenez ! voilà comme je m’y prenais dans le temps que je n’étais qu’un écolier maladroit… » Et il ne dit pas maladroit, car il s’admire rétrospectivement et son amour-propre se baise lui-même sur son front d’enfant. Ainsi, le volcan éteint nous jette, après coup, ses scories ! Nous avons la pluie de cendres, sans les feux… De gaieté de cœur, le poète s’est rapetissé lui-même en se repliant en arrière. C’est le contraire du duc de Guise tombé. Debout, il paraissait plus grand !…

Et je vous assure que je ne suis pas médiocrement