Page:Barbey d’Aurevilly - Les Poètes, 1889.djvu/303

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De temps en temps, une Revue, à laquelle il faut rendre cette justice qu’elle n’a pas cessé d’être littéraire quand la littérature véritable, la littérature désintéressée n’avait pas une pierre pour reposer sa tète, l’Artiste, publiait des vers charmants à faire presque croire qu’Alfred de Musset vivait toujours… Ces vers, qui, d’ailleurs, ne jouaient ni au pastiche, ni au mystère, ces vers sincères, étaient sincèrement signés de ce nom euphonique de Saint-Maur, qui, du moins, n’écorchera pas la bouche de la gloire, si cette renchérie se donne la peine de le prononcer ! Ce fut donc dans l’Artiste, et exclusivement, je crois, dans l’Artiste, cet écrin des poètes niellé par Arsène Houssaye et par Coligny, que ce nom de Saint-Maur, si bien fait pour briller un jour, commença doucement de reluire. Comme l’émeraude, ces feux attirèrent. Bientôt, le poète de l’Artiste eut ses quarante personnes auxquelles Stendhal, l’homme de goût, noblement dégoûté, bornait la gloire. Il eut autour de lui, mais très serrée autour de lui, une chaîne sympathique et vibrante, et dans cette chaîne, il y eut un homme qui en valait bien— à lui seul, deux ou trois ! C’était Alexandre Dumas, le plus grand prestidigitateurqu’aient eule théâtre, le roman et la causerie, dont de Saint-Maur a gardé comme un éblouissement. Il y avait aussi, payant pour plusieurs, Roger de Beauvoir, le plus brillant des boute-en-train littéraires, ce Roger Bontemps qui n’a pas duré (hélas ! les bons