Page:Barbey d’Aurevilly - Les Poètes, 1889.djvu/92

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avaient découvert dans Hugo la qualité qui fait le dieu : la vie immobile, féconde, éternelle ; le brisement de la faux du Temps. Il y a eu, Dieu merci ! depuis, beaucoup de vie encore dans ce vieux chêne de poète, mais, franchement, lorsque je lis en cette Légende des Siècles, où je trouve des pièces comme VAbime, le Ver de terre, l’Élégie des Fléaux, A l’Homme, et bien d’autres qui rappellent les plus purs amphigouris des premières Légendes, et pas une pièce comme Booz, Eviradnus et le Petit roi de Galice, il m’est impossible de ne pas voir dans le Victor Hugo de ces secondes Légendes une diminution de la vitalité poétique. Sans doute, l’affaiblissement de Hugo serait une force encore dans un autre homme ! mais dans Victor Hugo, c’est relativement une débilité. Les maladroits qui lui cassèrent journellement la tête avec l’encensoir de sa phénoménale vieillesse, avaient là une insolente flatterie. Le Nestor était devenu visible dans l’Achille… Mais être Nestor, c’est encore une belle chose, et il aurait été plus respectueux de s’en taire que de dire qu’il ne l’était pas !

V

Ce n’est pas, du reste, la seule opinion qui diffère en moi de l’opinion de ces Corybantes forcenés qui dan